Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'Ire du Temps
Derniers commentaires
Archives
8 juin 2008

La colère, un vrai savoir-ire à la française

Ba_C3_AEllement_1_Pour avoir souvent discuté avec une amie néerlandaise de ce qui l'amusait ou ce qui lui paraissait étrange dans le comportement des Français, j'ai remarqué qu'un mot revenait souvent : la colère.  Il faut dire que cette impassible Batave, qui vit en France depuis bientôt quarante ans, est douée d'une nature apaisée et apaisante, d'un calme qu'elle communique volontiers dans son timbre de voix et ses propos toujours mesurés. Difficile pour elle -pourtant ô combien insérée dans la vie française- de se gausser du jeu de certains acteurs qui incarnent le parfait petit Gaulois irascible, tels De Funès ou, dans un autre genre, Blier. Personnellement, j'ai toujours eu une tendresse particulière pour les grincheux et les colériques du petit et grand écran, les coups de gueule de Muriel Robin dans Tout m'énerve ou encore Saint Jacques la Mecque.  Cette incompréhension me ramène une fois de plus à la question de la culture véhiculée par notre langue maternelle. Tous ceux qui ont un jour entrepris d'apprendre une langue étrangère -avec toute l'humilité que requiert cette démarche- le savent bien : au-delà des mots, on entre également en contact avec des façons d'être et des modes de pensée étrangers, que l'on s'efforce d'analyser et de comprendre mais que l'on ne fait pas nécessairement siens. Il en va ainsi pour l'art très français de la colère. Je crois qu'il faut être imbibé de culture latine pour ne pas s'effrayer des éclats de voix dont sont capables nos compatriotes pour des motifs parfois bien futiles. C'est là une particularité de nos colères : elles naissent de tout et de... rien ! L'Anglais et son flegme légendaire ne pourra s'empêcher d'écarquiller les yeux d'incompréhension aux premiers crescendos provoqués par quelque propos malheureux. Les populations nordiques s'étonneront toujours de voir le petit Gaulois s'empourprer de colère dès la plus petite contrariété et vociférer des propos radicaux dans un argot à peine compréhensible pour l'oreille étrangère. Dès lors, quand il s'agit de mettre en scène des colères "bien de chez nous", les artistes se frottent les mains d'avance. Ils vont pouvoir trépigner, hurler, se perdre en déclamations apocalyptiques et se réjouir d'avance à l'idée que nous serons tous pliés devant ces excès d'ire que nous reconnaissons presque comme notre patrimoine national. D'ailleurs, le très méridional et très irascible Raimu n'est-il pas l'emblème même de ces accès de colère délirants et décalés que l'on revoit toujours avec le même plaisir dans les indémodables productions pagnolesques? Oui, mais voilà. Le rire comme la colère ne s'exportent pas si facilement. Difficile de comprendre les colères latines quand on a pour exemple national les trépignements agacés d'un McEnroe et son désormais très célèbre "you cannot be serious!"... Bon, après tout, on ne peut exceller dans tous les domaines. Ici, en France, nous restons les champions incontestés (et parfois incompris) de la colère... On a les records qu'on peut!

Publicité
Commentaires
L'Ire du Temps
Publicité
L'Ire du Temps
Publicité